Et si on voyageait sur place ?

± 3 minutes de lecture Écotourisme

Mon ami Jean est un grand voyageur. Parti en Afrique du Sud, il a créé une école de danse dans le township de Soweto et y a vécu plus de deux ans. Arrivé en Inde, il a acheté un immeuble à Dehli pour y accueillir 400 enfants de la rue. Deux ans plus tard, il s’est converti au bouddhisme et a épousé une Tibétaine selon les rites traditionnels. Rentré en France avec femme et enfant, il m’a confié : « je ne partirai plus : pour rencontrer l’étranger, il suffit de traverser la rue. L’étranger, c’est le gars sur le trottoir d’en face ». C’était il y a vingt ans, et Jean a tenu sa promesse.

Rue à Dehli (Inde)
Rue à Dehli (Inde).

Al País

Quant à moi, j’ai un peu voyagé, mais j’ai beaucoup déménagé ! Et dans chaque lieu que j’ai habité, j’ai voulu m’enraciner. Explorer le territoire, connaître son histoire, comprendre ses paysages, rencontrer ses habitants, accéder à l’intimité de son patrimoine, tisser des liens avec ses acteurs locaux… D’un quartier à l’autre, d’une ville à l’autre, d’une région à l’autre, c’était à chaque fois un nouveau monde !

J’ai quitté Marseille pour le Cantal en 2017, et ce fut une nouvelle expérience de l’altérité. J’ai rapidement rencontré une foule de gens passionnants, et j’ai décidé de ne plus m’en éloigner. Voilà donc sept années que je voyage dans le « païs » que j’habite… et que je vais de surprise en surprise. En paraphrasant mon ami Jean, on pourrait dire : « l’étranger, c’est le gars dans le champ d’en face ».

D'Aurillac à Aurillac

À Aurillac, la rue où j’habite se situe sur la Via Arverna, variante auvergnate du chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle. Un beau jour d’été 2022, sac sur le dos, j’ai descendu les escaliers en bois de mon immeuble, direction Santiago ! J’ai marché durant un mois, bivouaqué chaque soir où je pouvais, rencontré nombre de pèlerins et riverains, et finalement fait demi-tour à la frontière gersoise, boulot oblige…

Le randonneur rumine ses pensées, les vaches ruminent l'herbe fraîche...
Ruminer sur le chemin...

La lenteur de la marche, avouons-le, peut parfois se montrer exaspérante, mais le temps qu’elle impose est celui de notre humanité. Ainsi, quand pas après pas, la lointaine silhouette d’une vieille paysanne se rapproche doucement, la rencontre s’impose : peut-être juste quelques mots échangés, mais déjà, ça change tout. « L’étrangère, c’est la mémé en haut de la côte ».

Ici, c'est ailleurs

Finalement, inspiré par toutes ces expériences, j’ai entrepris de voyager à pied aux alentours de chez moi. Je veux dire : en partant directement de mon appartement, à pied, équipé de mon fidèle sac à dos et de mes bonnes vieilles chaussures. Et c’est une découverte sans cesse renouvelée : il y a les lumières qui changent, les saisons qui évoluent, les recoins qui se dévoilent, les détails qui se révèlent, les rencontres qui se multiplient. J’en suis convaincu : on n’a jamais fini de connaître la terre qu’on habite.

Fort de cette conviction, j’ai créé, courant 2023, le site aux-vallees-du-puy-mary.fr, qui propose de suivre le cours des rivières cantaliennes jusqu’à leurs sources sur les flancs du puy Mary, montagne emblématique du Cantal. Ces itinéraires invitent les Cantaliens eux-mêmes à porter un regard neuf et curieux sur les vallées qu’ils habitent. Et bien sûr, ils proposent également aux touristes d’explorer ces territoires singuliers sur une surface restreinte afin d’en sonder les profondeurs intimes.

Botte de foin posée sur un pré dans la vallée de la Cère (Cantal)
Vallée de la Cère (Cantal).

De balade en rencontre, par des recherches et souvent par hasard, j’ai peu à peu construit une complicité véritable avec le lieu que j’habite. Tant et si bien qu’aujourd’hui, sept ans après mon arrivée dans le Cantal, je donne des conférences en divers lieux du département pour faire connaître aux habitants les richesses de leur territoire. Des richesses que la plupart du temps ils connaissent, mais dont ils ne s’étonnent plus. Or c’est là, je crois, le secret d’un beau voyage : une renaissance à l’émerveillement.

Voyagez sur place !

L’expérience dont je témoigne ici peut évidemment se vivre en tout lieu. J’invite chacun à arpenter son environnement avec un regard toujours neuf et une curiosité sans cesse renouvelée. L’invitation au voyage que je propose au long des vallées du puy Mary peut se décliner partout, chacun chez soi peut franchir sa porte comme s’il traversait une frontière lointaine.

Difficile de faire plus écologique et plus économique comme voyage ! Le voyage sur place, une expérience de sobriété heureuse



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